François Lana Trio - Cathédrale
F
Leo Records
Les piano-trios sont légion, frisant la pléthore: difficile dans ce contexte de se singulariser. C'est pourtant le cas du trio du pianiste François Lana, une forte personnalité, riche de contrastes.
Il se réfère volontiers à la tradition qu'il connaît parfaitement: il cite ainsi Thelonious Monk, Andrew Hill (largement sous-estimé) et Herbie Nichols auquel Misha Mengelberg a rendu hommage (Change of season avec Steve Lacy). Il a aussi développé une technique très personnelle, basée sur de vifs changements de rythmes (à l'image de Martial Solal) et maîtrise parfaitement de nouveaux outils (synthés, réverbération du son, cordes frappées au travers du corps du piano).
Basé à Zurich, il a formé un premier trio avec Xaver Ruegg (cb) et Martin Perret (dm), puis celui-ci avec le Valaisan Fabien Iannone qui a collaboré avec Ben Street et l'Anglais Phelan Burgoyne qui a étudié la batterie avec Jeff Ballard et a enregistré Introducing Rebop, avec Jorge Rossy (le batteur de Brad Mehldau) au vibraphone.
Pour cet album Leo Records, François Lana propose 8 compositions originales aux atmosphères contrastées mais parfaitement cohérentes.
L'album s'ouvre sur Chaos Momentum, une pièce qui se revendique d'une certaine avant-garde avec un tumulte de sonorités. Retour à une certaine tradition des années '60, avec Hillness (Tribute to Andrew Hill), un hommage très marqué à ce pianiste qui a enregistré nombre d'albums Blue Note, en trio avec Richard Davis et Roy Haynes ou Elvin Jones et est l'auteur d'un disque phare de cette époque: Point of Departure, un des albums majeurs enregistrés avec Eric Dolphy (à la même époque que Out to lunch).
Der Turm est joué sur tempo vif, avec de nombreux changements de rythmes (à l'image de Martial Solal). Divertissement se développe dans un climat plus serein. Black socks, no sugar est basé sur un ostinato obsédant de la main gauche tandis que la droite cavale en pleine improvisation.
Sur Nocturne, Lana use avec parcimonie du synthé et de diverses réverbérations du son. Cathédrale, le titre éponyme, s'inscrit dans l'optique avant-garde de Lana: piano préparé, jeu sur les cordes frappées à même le cadre du piano sur trame de l'archet.
Un pianiste d'une grande subtilité technique, en parfaite interaction avec une contrebasse volubile et très mélodique et un batteur au drive implacable.
Une heureuse découverte.
© Claude Loxhay