Filippo Bianchini 4tet - Le Voyage
F
September
On avait découvert le saxophoniste italien Filippo Bianchini en concert et au travers de son album Disorder at the border qui mettait en valeur son ténor post-coltranien.
Né à Orvieto, Bianchini a découvert le jazz au travers de Sonny Rollins, John Coltrane et de son compatriote Massimo Urbani, saxophoniste alto qui a côtoyé Rava et Pieranunzi mais aussi les pianistes américains Ron Burton et Mike Melillo. Elève du saxophoniste Mario Raja au Conservatoire de Pérouse et de John Ruocco à Den Haag, Bianchini s'est installé à Bruxelles depuis quelque temps.
Voici le deuxième album enregistré en Belgique: un projet original puisqu'il s'agit de revisiter les chansons ou plutôt la "musique" d'Adamo ("inspired by the music of Salvatore Adamo" indique la pochette), comme, avant lui, Enrico Rava ou Paolo Fresu ont revisité de grands titres de la chanson italienne.
Pour les arrangements, le saxophoniste ténor s'est adressé à son compatriote, pianiste et leader d'un big band, Lorenzo Agnifili et on peut dire que celui-ci a réalisé un travail d'orfèvre, en proposant une version authentiquement "jazz" de six mélodies célèbres du chanteur italo-belge: ce qu'a fait Fred Delplancq avec Il a neigé sur yesterday, succès de Marie Laforêt, sur l'album Horizons ou Coltrane avec Chim Chim Cher-ee, chanson phare de Mary Poppins.
Pour cet album, Bianchini et Agnifili ont jeté leur dévolu sur des chansons des années '60: de Une Larme aux nuages de 1962 à Inch'Allah de 67, en passant par Sans toi ma mie (63), Perduto amore (64) ou La Nuit (65), auxquelles Bianchini a ajouté sa composition originale Le Voyage qui donne son titre à l'album.
Aux côtés du saxophoniste, on retrouve, comme sur Disorder at the border, d'une part, Nicola Andrioli, le pianiste de Philip Catherine, Mimi Verderame, Lorenzo Di Maio et des duos avec Barbara Wiernik et Steven Delannoy, d'autre part, une solide rythmique, constituée de l'expérimenté Jean-Louis Rassinfosse, soit l'assurance d'un ligne de basse inflexible, et du batteur Armando Luongo, le gage d'un groove inextinguible.
Enfin, sur deux plages Inch'Allah et La Nuit, le quartet accueille Jean-Paul Estiévenart en invité.
Plusieurs plages s'inscrivent résolument dans le registre de la ballade au lyrisme mélodique (Perduto amore, Une Larme aux nuages, Tombe la neige) tandis que, avec la trompette de Jean-Paul Estiévenart, La Nuit (belle intro de contrebasse) et surtout Inch'Allah relèvent davantage d'un néo-bop groovy. D'autres plages, enfin, optent pour un tempo énergique: Sans toi ma mie avec un beau solo de piano ou alors Le Voyage où Bianchini retrouve ses accents coltraniens les plus véhéments.
Un projet abouti.
© Claude Loxhay