Les jeunes pousses d’Israël en trois albums
Various
Autoproduction / Ubuntu Music / Origin Records
De la scène jazz israélienne les noms de Avishai Cohen (le contrebassiste et le trompettiste), de Anat Cohen, Ziv Ravitz, Yonathan Avishai sont parmi les mieux connus chez nous. Il existe aussi une nouvelle génération d’instrumentistes de talent à découvrir.
Ariel Bart - In Between
Autoproduction
Ariel Bart est né en Israël en 1998 et a débuté l’harmonica à l’âge de 7 ans. A la fin de ses études à la New School University for Jazz and Contemporary Music à New-York, elle enregistre son premier album « In Between ». Auparavant, elle s’était déjà frottée à des musiciens comme William Parker ou Andrew Cyrille et a étudié avec, entre autres, Aaron Parks, Reggie Workman, Shai Maestro, Anat Cohen, Anat Fort ou Tony Malaby.
Non contente de créer un style personnel sur l’instrument, elle compose aussi l’intégralité de ce premier album. « Spiritual Wars » nous emmène dans les mondes croisés de l’harmoniciste, mix de tradition américaine, de musique européenne et d’influences orientales traversées par des images. Aussi « Stranger on the Hill » nous emmène dans un univers onirique quasi cinématographique.
Une des originalités de l’album est d’avoir associé le quartet piano-basse-batterie à un violoncelle, « Memory of a Child » prend ainsi un joli supplément de tendresse, et Mayu Shviro introduit « In Between » par un beau solo de violoncelle. « In Between », un peu entre deux mondes, celui de l’occident et de l’orient, révèle une belle harmoniciste qu’on pourrait classer, comme l’aurait dit Toots, entre un sourire et une larme.
Musiciens:
Mayu Shviro - cello
Moshe Elmakias - piano
David Michaeli - contrebasse
Amir Bar Akiva - batterie
Ariel Bart - harmonica
Roy Mor - After The Real Thing
Ubuntu Music
Avec une réputation déjà bien assise en Israël, le pianiste Roy Mor sort un album reflet d’influences culturelles liées à la tradition du jazz et à ses origines. Le pianiste-compositeur n’était au départ pas destiné à une carrière musicale puisqu’après des études de philosophie et d’ingénieur, une carrière s’ouvrait à lui chez Microsoft. Roy a toutefois préféré s’exprimer dans sa passion pour la musique en s’installant à New-York, dans la même institution que Ariel Bart. Il y travaille avec Anat Cohen, Esperanza Spalding, Ben Wendel ou Dave Douglas. De retour dans son pays natal, il participe à un trio avec le trompettiste Avishaï Cohen.
Avec « After The Real Thing », il sort son premier album enregistré à Brooklyn. Au cœur d’une majorité de compositions personnelles, on trouve deux standards du jazz qui laissent deviner qu’on a affaire à un musicien qui respecte la tradition : « Speal Low » de Kurt Weil et « The Nearness of You » de Hoagy Carmichael enregistré en public. Le pianiste est toutefois aussi très influencé par les musiques traditionnelles de sa région car aux côtés d’un trio au line-up mouvant, on découvre le oudiste Amos Hoffman qui colore de belle façon trois compositions : « The Echo Song », une chanson folk israélienne rendue célèbre par le chanteur Arik Lavi, est introduite par le oudiste dans un esprit traditionnel avant que le pianiste ne traite le thème en valse séduisante. « After The Real Thing », le titre éponyme, est quant à lui bien dans la tradition jazz bop avec une rythmique très efficace composée de Myles Sloniker et Itay Morchi. « Jerusalem Mezcla » (inspiré par un plat traditionnel) repart sur des accents orientaux avec de nouveau un superbe solo de Amos Hoffman. « Nikanor » présente le seul souffleur de l’album, le bugliste Davy Lazar particulièrement en évidence sur ce tempo medium auquel il apporte chaleur et émotion.
Une des réussites de l’album est de créer une réelle cohérence entre standards, compositions personnelles et thèmes de la culture israélienne.
Un premier album plus que prometteur.
Musiciens:
Roy Mor - piano
Amos Hoffman - oud
Davy Lazar - bugle
Myles Sloniker - contrebasse
Itay Morchi - batterie
Amit Friedman - Unconditional Love
Origin Records
A quatorze ans, Amit Friedman est amené au « Blue Note » de New-York par ses parents. Une soirée en deux temps : Jon Hendricks en première partie, Jimmy Smith en seconde ! Autant dire que cette soirée est restée dans les mémoires du saxophoniste, lui qui avait débuté l’instrument à huit ans. Ce disque, il le dédie à son père qui lui avait dit en sortant du Blue Note : « Le jour où tu joues ici, je veux être ton chauffeur et te conduire en limousine ! »
Une nouvelle fois, voici un jazz souvent inspiré par la culture du Moyen-Orient – on retrouve le oudiste Amos Hoffman. Ce n’est pas le cas du thème d’ouverture « Home at Last » aux accents très hard bop dont le saxophone ténor est clairement inspiré : swing ravageur, phrasé énergique, longue séquence improvisée.
« Alma » est inspiré par la musique sud-américaine avec son côté bossa chantée par le Brésilien Joca Perpignan. « Rill-Rool » est un brillant duo sax soprano-piano avant le bluesy « Blues for Jackito » et un « cover » en conclusion, la très jolie mélodie folk « Junk » composée par Paul McCartney. « Unconditional Love », titre de l’album, traduit bien le penchant du saxophoniste pour les tendres mélodies. Une galette qui s’écoute en traversant un kaleïdoscope d’émotions.
Musiciens:
Amit Friedman - tenor & soprano sax
Tom Oren - piano
Gilad Abro - bass
Yonatan Rosen - drums
Amos Hoffman - oud (8,9)
Rony Iwryn - percussion (7,8,9)
Doron Talmon - vocal (9)
Joca Perpignan- vocal (7)
© Jean-Pierre Goffin
Une collaboration JazzMania / Jazz’halo