Valentin Clastrier et Steven Kamperman - Fabuloseries
V
Homerecords
Grand spécialiste de la vielle à roue et inventeur de l’ « electro-acoustical hurdy gurdy » qui fait passer l’instrument traditionnel de dix à vingt-quatre cordes lui offrant ainsi d’innombrables nouvelles ouvertures, Valentin Clastrier est un musicien d’autant plus exceptionnel qu’il se fait rare. De guitariste de Jacques Brel (il participe à « L’Homme de La Mancha »)… à la musique jazz contemporaine de Louis Sclavis, Carlo Rizzo, Michel Godard, Michael Riessler et Jean-Louis Matinier (« Le Bûcher des Silences » en 1994) et ses collaborations avec « Un Drame Musical Instantané », la découverte de nouveaux terrains sonores semble constante chez ce virtuose. Alors, la sortie d’un album sur le label « Homerecords » titille la curiosité.
Associé au poly-clarinettiste et sax-soprano Steven Kamperman, il nous délivre une galette inclassable… mais on va tout de même essayer. Tout d’abord, définir les sonorités du « hurdy gurdy » ( dont pour ma part je ne connaissais le nom que par la chanson de Donovan !) relève d’un exercice inconfortable : on y entend dès l’entame de « Et la roue de la vie » des accents de musique traditionnelle rassurants, mais on se ravise rapidement tant l’instrument nous fait perdre tout repère.
L’instrument ? On a souvent l’impression d’en entendre dix à la fois tant l’orgie sonore frise le délire, ce duo est un orchestre, par moment acoustique, souvent électrique, rockisant, voire carrément punk, jazz aussi quand on y perçoit un brin de la folie de Roland Kirk, à moins que ce ne soit une touche d’hermétisme contemporain, ou l’emballement d’une fanfare. Steven Kamperman multiplie les sonorités sur ses clarinettes avec claquements de bec, jeux de souffle et pénètre magnifiquement l’univers de la vielle électrique. Alors, punk-trad, world-crossover, trad-jazz ? Sûr que ces deux-là se moquent de toutes les définitions possibles de leur univers, qui est tout simplement le résultat d’une fascinante rencontre.
Jean-Pierre Goffin