Renaud Garcia-Fons - La Vie Devant Soi
R
e-motive records
On connaît Renaud Garcia-Fons pour son extraordinaire virtuosité à la contrebasse à cinq cordes comme pour son amour du bassin méditerranéen et, particulièrement du flamenco (album Paseo a dos, avec le pianiste espagnol Dorantes), mais aussi pour son attrait de l'Orient (Oriental Bass).
Après avoir beaucoup voyagé, il évoque ici sa ville natale, au travers d'un véritable hymne au Paris multiculturel: une réponse à un certain malaise actuel. Le titre de l'album, emprunté au livre de Romain Gary, est lui-même éloquent, lui qui renvoie à "un conte humaniste qui évoque ce lien extraordinaire entre un petit orphelin arabe et une mama juive".
Au travers de 11 compositions originales, le contrebassiste multiplie les références littéraires: outre Gary, Prévert (Le long de la Seine), la Zazie de Queneau (Je prendrai le métro), le Petit Nicolas de Goscinny (Les Ecoliers). Sont aussi sollicités l'oeil de Doisneau (Après la pluie), la poésie de Trenet (Revoir Paris), la gouaille de Michel Simon (Monsieur Taxi) ou le message d'espoir de Gandhi ("La vie persiste au sein même de la destruction" en dédicace à Elégie de novembre).
Pour voyager entre ces Rues vagabondes, de Montmartre en courant jusqu'au Long de la Seine, Renaud Garcia-Fons s'est entouré de l'accordéoniste David Venitucci, déjà présent sur l'album Méditerranées comme lors d'un concert mémorable lors du regretté Jazz Brugge et de Stephan Caracci (vibraphone et percussions), un musicien qu'on a entendu aux côtés du saxophoniste Raphaël Imbert ou au sein du Jazz Ensemble de Patrice Caratini.
Cette formation permet une belle alternance: lors de certains thèmes, c'est la contrebasse jouée à l'archet qui joue la mélodie avec un lyrisme flamboyant (Revoir Paris, Le long de la Seine, La Vie devant soi, Après la pluie), tandis qu'à d'autres moments, c'est l'accordéon qui porte le thème sur fond de pizzicati virevoltants (Montmartre en courant, Monsieur Taxi). Tantôt on retrouve Stephan Caracci au vibraphone cristallin, surtout lors de belles introductions (Les rues vagabondes, Le long de la Seine, Après la pluie), tantôt on l'entend, tout en délicatesse, aux "brush drums" ou sur ses "acoustic pads" (Montmartre en courant).
Pour reprendre la phrase de R.W. Emerson citée pour Les Rues vagabondes, "la vie est un voyage, pas une destination": c'est ce voyage que nous propose cet album que Renaud Garcia-Fons dédie à son père, le peintre Pierre Garcia-Fons.
Texte © Claude Loxhay
Photos © Solène Person