Kris Defoort's Diving Poet Society
K
WERF RECORDS
Doté d’une formation classique, mais aussi d’une expérience jazz débutée à Liège, le pianiste brugeois Kris Defoort présente une des carrières les plus éclectiques du paysage musical international.
Avec un réel esprit d’aventure et de découverte, il a multiplié les expériences : le KD’s Basement Party, sextet avec ses amis Fabrizio Cassol et Michel Massot (album « Sketches of Belgium », WERF n° 1); KD’s Decade, trio avec Dré Pallemaerts et, déjà, Nicolas Thys, dans un répertoire alliant compositions personnelles, Monk et Sting; formation de 11 musiciens, dont Laurent Blondiau, Michel Massot, Pierre Bernard mais aussi George Alexander au violon et Jan Kuiken au violoncelle, pour « Varations On A Love Supreme », projet concocté avec Fabrizio Cassol; quartet avec le saxophoniste américain Mark Turner et Jim Black (Sound Plaza); le Dreamtime, nouvel ensemble de 11 musiciens pour « Passages » avec chorégraphie; projet « Conversations/Conservations », avec le Dreamtime, la chanteuse lyrique Claron Mc Fadden et le quatuor Danel; « An Old Monk », projet théâtral avec le comédien Josse De Pauw; albums « Trio Live in Bruges », « Solo Live in Tokyo » et « Monks Dance » avec Josse De Pauw. Le tout avec une belle fidélité envers Rik Bevernage de de De Werf. Ce qui explique la dédicace de ce Diving Poet : « A very warm gratitude to Rik Bevernage, founder of De Werf: the flourishing and creative Belgian Jazzscene of today would never have existed without your everlasting indispensable support for over more than 40 years » !
Ce nouveau projet, « Diving Poet Society », est lui aussi marqué du sceau de l’éclectisme et d’un esprit innovant : marier musique et poésie. Pour cela, Kris Defoort a d’abord jeté son dévolu sur deux poèmes de l’auteur brugeois Peter Verhelst : « The pine tree and the marching » et « The pine tree and the fire », version anglaise de deux textes issus du recueil « Nieuwe Sterrenbelden » pour lesquels Kris Defoort a composé la musique. Mais il ne s’est pas arrêté là : il a composé d’autres musiques (Diving Poets, Diepblauwe Sehnsucht, New Sound Plaza) et a écrit d’autres textes (Liquid Mirrors, Heavenly Billie), lui permettant de rendre hommage, d’une part, à Pierre Van Dormael qu’il a croisé pour le projet « Vivaces » et, d’autre part, à Billie Holiday. Pour cet album, il lui fallait donc une voix : une vocaliste aussi à l’aise dans les textes chantés que récités, ou utilisant la voix comme un réel instrument au travers de vocalises (bel exemple sur Diepblauwe Sehnsucht et New Sound Plaza). Il a porté son choix sur la vocaliste hongroise Veronik Harcsa, qu’il avait croisée grâce au Budapest Music Center et que le public belge, du Gaume comme du Théâtre Marni, connaît bien pour son duo avec le guitariste Bálint Gyémánt, avec lequel elle a enregistré notamment « Lámpafény » sur des poèmes hongrois du XXe ou « NextApe », le groupe pop-rock fondé par Antoine Pierre.
Dans l’optique d’offrir un contrechant à la voix claire de Veronika Harcsa, Defoort a convié l’alto de Guillaume Orti, le saxohoniste de Kartet et du MegaOctet, en France, et de Mâäk, MikMâäk ou Octurn en Belgique. Quant à la rythmique, c’est celle du trio habituel : Nic Thys à la basse électrique, précieux contrepoint aux sonorités acoustiques du piano et Lander Gyselinck, dont le jeu décalé évoque le Jim Black du Sound Plaza. L’album s’ouvre sur The Pine Tree and The Marching, avec un texte d’abord récité sur un ostinato du piano, puis chanté en accord avec la sonorité incisive de l’alto. Que ce soit sur Liquid Mirrors (avec intro de basse), sur The Pine Tree and The Fire ou Heavenly Billie (avec intro de piano), Veronika Harcsa mêle texte chanté, déclamé et vocalises en parfaite osmose avec l’alto. Les cinq complices apparaissent ainsi comme les couleurs d’un arc en ciel musical : turquoise pour Harcsa, orange pour Orti, violet pour Defoort, bleu profond pour Thys et bleu clair pour Gyselinck, comme l’indique la pochette. Une musique qui oscille entre jazz contemporain et musique d’inspiration classique : « cinq poètes musicaux communiquant la joie de plonger dans un océan plein de couleurs infinies, de mots et de sons » (Kris Defoort).
© Claude Loxhay
Article publié par jazzaroundmag.com
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