Gueorgui Kornazov - Manu Codjia - Geoffroy Tamisier: Le Gris du Vent
G
www.kornazov.com
Avec cet album, Gueorgui Kornazov (tb), Geoffroy Tamisier (tp) et Manu Codjia (g) célèbrent de longues années de complicité. Les trois musiciens appartiennent à la même génération: le premier est né en 1971, le deuxième en 1973 et le troisième en 1975.
D'origine bulgare, Gueorgui Kornazov a débuté ses études à Sofia pour les terminer au Conservatoire de Paris où il va croiser nombre de musiciens qu'il retrouvera plus tard. Très vite, le tromboniste s'impose au sein de grandes formations: l'Orchestre National de Jazz de Paolo Damiani en 2000, le Paris Jazz Big Band (album " Mediterraneo") et le Vienna Art Orchestra. Il acquiert aussi une renommée internationales avec le Strada Sextet d'Henri Texier ("Vivre" en 2004, "Water Alert" en 2006), formation au sein de laquelle il croise Manu Codjia. On le retrouve aussi en compagnie du pianiste Jean-Marie Machado, du batteur Bertrand Renaudin ("L'arbre voyage") et de Nguyen Le ("The dark side of the moon"). En 2004, il enregistre, à son nom, "Essence de rose" en compagnie de Manu Codjia et de Geoffroy Tamisier qu'il avait, par ailleurs, croisé au sein de OHL Acoustic ("Une vie sans lune") et, en 2006, il fonde le flamboyant quintet Horizons auquel participent Manu Codjia, Geoffroy Tamisier et Emile Parisien ("Silla" et "The Budapest Concert", album BMC chroniqué l'an dernier).
Ses deux complices ont, eux aussi, un parcours riche d'expériences multiples. Geoffroy Tamisier a fait partie du Gros Cube d'Alban Darche (album "La Martipontine" sur lequel il croise Laurent Blondiau), du deuxième ONJ de Claude Bathélemy ("La Fête de l'eau", "Admirabelamour") et de Mukta, d'inspiration indienne, avec Brigitte Menon au sitar. A son nom, il enregistre "Au bonheur des anges", en trio intimiste.
De son côté, après avoir étudié la guitare classique, Manu Codjia s'est tourné vers le jazz au Conservatoire de Paris. Il a enregistré avec Mathieu Donarier (ts), Erik Truffaz (tp), Christophe Monniot (Monomania), Daniel Humair et son Baby Boom ainsi qu'avec Henri Texier. Il a différents albums personnels à son actif, notamment avec un quintet comprenant... Kornazov et Tamisier.
Les trois complices se sont donc croisés à de multiples reprises et l'on croyait bien connaître leur univers musical: trombone tonitruant à la sonorité "grasse" pour l'un, guitare aux flamboyantes envolées électriques pour l'autre. Avec ce "Gris du Vent", les trois compères musiciens et compositeurs risquent bien d'en étonner plus d'un: c'est qu'ils proposent ici une "musique chambriste savamment composée... on peut se laisser porter jusqu'aux rives de la musique française, Debussy, Ravel ou Fauré pour les moments calmes mais aussi vers Stravinsky et Bartok pour les passages plus tendus" (texte de la pochette).
Au répertoire, quinze plages aux alliances sonores savamment étudiées: 5 compositions de Kornazov, 4 de Tamisier, 2 de Codjia et 4 courtes compositions collectives plus ouvertes à l'improvisation. Au total, une musique intimiste, aux "lignes épurées et aux climats aérés" comme le proclame Félix Marciano de JazzMan: la sonorité ouatée du trombone se fond en totale osmose avec la sonorité feutrée de la trompette ou du mélodica (Song for Mayli) sur le canevas tissé par la guitare. Manu Codjia paraît tout aussi sage, notamment dans ses intros (L'Echarpe, Spring Rainbow, Pessen), ne se laissant aller à des sonorités irisées de guitare électrique qu'au travers des compositions collectives (Profondeurs) ou imposant un rythme de tango obsessionnel sur Tangorardo.
Une musique intimiste aux atmosphères apaisées: un arc-en-ciel printanier bercé par le gris du vent.
Claude Loxhay